Dernière mise à jour le 8 août 2025
Quand on pousse les portes de l’ancienne gare maritime de Cherbourg, on ne s’attend pas à plonger aussitôt dans l’aventure. Et pourtant. Derrière cette façade monumentale, vestige de l’Art déco des années 30, se cache un musée pas comme les autres. J’y suis allé trois fois. Et chaque visite m’a réservé son lot de surprises.
Un musée dans une gare maritime mythique
La Cité de la Mer s’installe dans un lieu emblématique : la gare maritime transatlantique de Cherbourg, construite en 1933 par l’architecte René Levasseur. Ce bâtiment monumental a vu passer les plus grands paquebots du XXe siècle. Le Titanic y a fait escale le 10 avril 1912. Le Queen Mary, le Normandie, tous ont embarqué ici des passagers pour le Nouveau Monde. Aujourd’hui, les valises ont laissé place aux sacs à dos. Et l’histoire se visite.
Dès l’entrée, le ton est donné : dans le hall, une impressionnante collection d’engins d’exploration sous-marine nous accueille. Nautile, Alvin, Globule… tous alignés comme pour prendre la mer. La Grande Galerie des Engins et des Hommes donne le ton : on est ici pour explorer les profondeurs.
Le Redoutable : immersion dans le plus grand sous-marin visitable au monde
La plupart des visiteurs foncent vers lui : le Redoutable. Le tout premier sous-marin nucléaire français, inauguré en 1971, mis hors service en 1991, est aujourd’hui visitable. C’est même le plus grand au monde ouvert au public. Une expérience unique.
On y entre par une cale sèche. Et là, tout change : lumières basses, couloirs étroits, odeur métallique. L’audioguide (plutôt bien fait) est guidé par la voix du commandant. On découvre les moteurs, la salle des torpilles, les couchettes, le poste de commandement. Les enfants peuvent choisir une version plus ludique, les adultes une version technique. Moi, avec mon mètre 89, je me suis vite rendu compte que la vie de sous-marinier n’était pas pour moi. C’est bas, spartiate, dense. Et étrangement fascinant.
Attention, la visite du Redoutable est interdite aux moins de 5 ans. Et mieux vaut y aller en début de journée, sous peine de faire la queue. C’est le clou du musée.
Juste après, ne manquez pas l’exposition attenante : « Océan sur écoute ». Un parcours original, sensoriel et plutôt ludique, qui permet de comprendre que les fonds marins sont tout sauf silencieux. Plusieurs zones se succèdent : l’univers sonore des animaux marins, les principes de discrétion acoustique d’un sous-marin, ou encore un simulateur de mission baptisé le Furtif, où l’on se met dans la peau d’un acousticien. C’est interactif et plutôt bien fait.
Aquarium et Océan du futur : entre requins, plancton et méduses
En haut, les trois étages de l’Océan du Futur déroulent une vision spectaculaire de la vie marine. Un immense aquarium abyssal de 10,70 mètres de profondeur, unique en Europe, représente un atoll polynésien. On y voit évoluer plus de 1000 poissons tropicaux, dans une lumière bleutée qui hypnotise petits et grands.
Autour, 16 autres bassins forment un parcours immersif baptisé « L’Océan du Futur ». On y observe une incroyable variété d’espèces : d’adorables bébés méduses, poulpes, hippocampes, requins pointes noires, poissons clowns, mais aussi plancton et coraux. Le parcours s’étale sur trois niveaux avec de grandes projections murales et des mappings vidéo qui nous plongent dans les abysses. On y découvre aussi les grands phénomènes marins : tectonique des plaques, volcanisme sous-marin, fosses océaniques…
Chaque bassin est accompagné de QR codes à scanner pour accéder à des contenus enrichis. L’idée est bonne, à condition d’avoir du réseau. Et si on ne veut pas toujours sortir son smartphone (ou qu’on est pas à l’aise avec la technologie), c’est dommage : pas toujours facile de savoir ce qu’on regarde.
Pour être honnête, j’ai préféré l’aquarium de Saint-Malo, visité l’an dernier : plus riche, plus lisible, mieux structuré pour comprendre. Mais celui de Cherbourg reste un beau moment, surtout en famille.
Titanic, retour à Cherbourg
Le parcours immersif “Titanic, retour à Cherbourg” s’ouvre dans la grande Salle des Bagages de l’ancienne gare maritime, un espace impressionnant au style Art déco. C’est ici que commence le voyage dans le temps : une première partie retrace l’histoire de l’immigration vers les Amériques. Un ordinateur permet même de vérifier si nos ancêtres ont tenté la traversée. Une belle mise en perspective historique, même si c’est un peu léger vu la taille de l’espace. Mais la salle sert encore aujourd’hui les jours d’escale.
Le 10 avril 1912, le Titanic accoste à Cherbourg à 18h35. 281 passagers embarquent pour la traversée de leur vie. Le reste du parcours fait revivre cet instant suspendu, mais aussi la légende du Titanic et son naufrage. En descendant un escalier qui semble longer la coque du navire, on passe d’une scène à l’autre : pont, coursives, messageries, passerelle, classes sociales. Toutes les 30 minutes, la même histoire se rejoue : la collision, le naufrage, les débuts de l’enquête. Une salle est même consacrée à la redécouverte de l’épave.
Le clou de cette visite : les 42 objets remontés du champ de débris qui entoure l’épave du Titanic. Parmi eux, des objets intimes et bouleversants : une carafe à décanter en cristal, un bracelet, un petit arrosoir en porcelaine (l’objet préféré de Paul-Henri Nargeolet, disparu en 2023), mais aussi les affaires de Marian Meanwell (modiste en 3e classe), du boulanger William Hyne ou du membre d’équipage William Murdoch. Tous ces objets racontent, à leur façon, le quotidien d’une époque, les rêves embarqués, et la tragédie qui les a figés.
Mais même avec tout cela, il manque encore un souffle. L’ambition est là, les décors sont beaux, mais l’expérience reste contemplative. On aimerait en voir plus sur les grandes explorations modernes, sur les missions de repérage de l’épave, sur les films, les analyses scientifiques. À Belfast, justement, le musée Titanic est plus immersif, plus sensoriel, plus marquant. À Cherbourg, c’est plus sobre. Trop peut-être.
Tarifs, horaires et bons plans
Le billet coûte 21€ pour les adultes, 15€ pour les enfants, gratuit pour les moins de 5 ans (mais sous-marin interdit pour eux). On peut acheter les billets sur place ou en ligne. Bon plan : les offices de tourisme du Cotentin proposent parfois des billets groupés, comme celui qu’on a pris à Saint-Vaast, combiné avec la traversée vers Tatihou. Coupe-file inclus.
La Cité de la Mer est ouverte tous les jours en haute saison, vérifiez les horaires sur le site en dehors des vacances. Tout est prévu pour les familles : restaurant, aires de pique-nique, stationnement vélo, toilettes, coin change, boutique.
Une visite riche, parfois inégale, mais marquante
Au final, la Cité de la Mer vaut clairement le détour. Pour le lieu, déjà : cette gare art déco gigantesque, ce hall d’embarquement, cette atmosphère unique. Pour le Redoutable, surtout. C’est là que le musée est le plus fort, le plus immersif, le plus marquant.
Les aquariums et les parcours sont bien faits, même s’ils gagneraient à être un peu plus interactifs. Le Titanic impressionne, mais pourrait être encore plus vivant. Il reste une expérience à faire, surtout en famille. On ressort de là avec des images plein la tête, et un petit air de transatlantique dans la peau.